La science moderne est un admirable monument qui fait honneur à l'espèce humaine et qui compense (un peu) l'immensité de sa bêtise guerrière. Hubert Reeves.

Ceux qui me connaissent vraiment savent que j’ai toujours un œil sur les nouvelles du ciel.
Cet intérêt vient très certainement de mon père qui avait, fut un temps, quelques ouvrages sur le sujet comme « Patience dans l’Azur » d’Hubert Reeves ou encore « Une brève histoire du temps » de Stephen Hawking. J’ai, depuis lors, une fascination pour l’espace et le temps, mais également pour notre histoire que l’univers nous expose au travers de ses images retraçant son évolution et dont nous faisons partie, dont nous sommes un produit.

Ceux qui me connaissent vraiment savent également combien j’aime replacer ce que nous vivons en tant qu’espèce dans le contexte global qu’est celui de notre univers en expansion, où notre existence est à la fois insignifiante et merveilleuse, très certainement commune mais également unique. Nous sommes perdus sur un petit point bleu, « A pale blue dot » comme dirait Carl Sagan. L’univers nous expose notre histoire à tous, et il nous enseigne cette vérité glaçante : Si nous venions à disparaitre, personne n’en saura jamais rien, personne ne s’en souciera. C’est une histoire classique, un cycle observable partout autour de nous. Des étoiles naissent, vivent et meurent emportant avec elles dans un déluge d’énergie le vivant de tous les corps orbitant autour d’elle.

C’est à notre espèce de s’élever grâce à la science et au savoir, pour tenter de nous extirper de cette fin programmée, nous en avons les moyens intellectuels, à la condition de prendre soin du seul vaisseau habitable que nous ayons pour l’heure, la Terre. Nous devons gagner du temps et épargner notre habitat du stress constant que nous lui faisons subir. Nous devons également combattre nos pulsions d’auto destruction, nos politiques d’un autre âge, notre vision fermée et ethno centrée.

Dans cette période trouble où l’on préfère les faits alternatifs aux vérités, où l’on vote à l’extrême par conviction idéologique, par bêtise, ou par frustration, j’avais besoin d’émerveillements, de partages, et d’échanges avec des personnes qui ont également le regard tourné vers les étoiles.

L’astronomie est un émerveillement qui se partage, qui se discute autour d’un oculaire (ok et d’une bière aussi), cela nous connecte avec l’univers, cela repousse en toile de fond tout ce pourquoi l’on se déchire pendant quelques instants, quelques heures, ou toute une nuit.

En faisant l’acquisition d’un télescope et en assistant à ma première nuit des étoiles j’ai pu observer, mais surtout, j’ai pu partager cet émerveillement. J’ai pu voir des parents inspirés, insufflant à leur enfants ce goût pour cette science. J’ai pu constater que tout n’est pas perdu et ça fait un bien fou.

L’astronomie nous remet à notre place et permet un peu de nous élever. Les distances s’expriment, l’immensité s’étale sous nos yeux et nous fait prendre conscience que la division n’est en rien une solution.


Mon premier télescope

Me voilà lancé dans ce nouveau hobby avec un poste d’observation qui sera principalement la terrasse de notre appartement. Loin d’être idéal pour l’observation du ciel profond au vu la pollution lumineuse, il a toutefois l’avantage d’être suffisamment dégagé pour la découverte du planétaire et c’est par là que je vais débuter. J’ai donc fait la récente acquisition d’un Celestron Nexstar 4se. Un petit diamètre de type Maksutov-Cassegrain facile à prendre en main et demandant peu, voir aucune calibration des miroirs.

Un télescope est 90% de son temps rangé dans un coin car les conditions à réunir pour une bonne observation sont nombreuses, mais en marge de la chasse aux étoiles, il y tant de choses à découvrir, lire et apprendre. J’ai passé de longues heures à écouter des podcasts, lire des articles généralistes sur le sujet. J’en ai appris plus sur la mise en station, sur l’optique, le mouvement des astres. J’ai été ébloui par les astrophotographes et la débauche des connaissances techniques mises bout à bout pour collecter du fond de leur jardin de superbes images à nous couper le souffle.

J’ai particulièrement apprécié une chaine Youtube qui retrace les aventures d’un couple décidé à photographier tous les objets du catalogue de Charles Messier depuis leur point d’observation favoris dans le désert du Nevada. Ces objets-là sont classiques et il existe des centaines d’images disponible, alors pourquoi ? pourquoi se lever tôt ou rester éveiller durant de si longues heures, souvent dans le froid mordant, et passer encore plus de temps à traiter cette collecte de lumière afin d’en extraire ce que l’on connait déjà si bien ? Je n’allais par tarder à le comprendre.

Une nuit sous les étoiles

Pendant une de ses longues nuits de recherche et en attendant que le ciel se dégage afin de tester pour la première fois mon télescope, je me demandai quelles associations et quels évènements existaient dans la région. En trouvant la SAFGA (Société Astronomique de France, Groupe d’Alsace) j’ai pu constater que le prochain évènement « La nuit de l’Astronomie » allait avoir lieu dans quelques jours. Cela serait, avec un peu de chance, ma première nuit sous les étoiles, et ma première expérience avec un télescope.

Rencontre avec une géante gazeuse

Me voilà donc sur le départ le samedi 29 avril, tout le matériel est empaqueté avec précaution, le temps est moyen, comme toute cette semaine là, mais l’évènement est maintenu et l’application météo de mon téléphone indique un dégagement le soir même. J’embarque avec un ami qui a eu la gentillesse de m’accompagner et de préparer les vivres pour cette première. Je n’ai pas la moindre idée de comment les choses vont se passer, mais il faut bien se lancer.

Une fois sur place je découvre sur les hauteurs du Champ du Feu (à une cinquantaine de minutes de Strasbourg), une longue rangée de passionnés qui terminent leur mise en place. D’autres font déjà découvrir aux petits et aux grands l’observation du Soleil. Il y beaucoup de matériel mais surtout il y a toutes les tranches d’âges, ça parle plusieurs langues, ça partage, ça rigole on est loin de la morosité des débats de l’entre deux tours.

Rapidement des visiteurs m’interrogent sur le matériel et sur le programme de la soirée. Je suis un peu gêné, car encore une fois, c’est tout juste si je ne sais pas quoi commencer. Mais je partage ce que j’ai appris tout en mettant en place mon matériel. Je réalise à présent, en regardant l’horizon que le ciel se dégage comme prévu, et rapidement plus un seul nuage ne gâche la fête. C’est même curieusement une nuit parfaitement claire et fraiche qui s’installe sur ces hauteurs partiellement recouvertes de neige. On a froid et on a faim mais les choses s’annoncent bien.

C’est repu que l’on réalise les premières observations de la Lune. La clarté des images et la précision des détails est impressionnante pour un instrument qui tient dans une petite valise. Mon ami jette un premier coup d’œil et c’est là que je réalise l’impact que l’observation astronomique peut avoir. Quelque chose se passe, ce n’est plus abstrait mais au contraire là, dans l’oculaire. On peut avoir vu les détails de notre lune des centaines de fois en ligne, à la télé ou dans des ouvrages, mais sentir la distance, se rapprocher à l’aide d’un instrument et observer les déplacements et les changements de luminosité est quelque chose de marquant et d’intime. Je suis satisfait de mon acquisition, et cela dépasse de loin ce que je pouvais imaginer, mais la suite de la soirée me réserverait encore une bien belle surprise.

La nuit tombe maintenant rapidement et le soleil passe lentement sous l’horizon. Plusieurs couples en profitent pour faire des photos, nous baignons tous dans les dernières lueurs du jour quand un premier objet très brillant fait son entrée dans ce large théâtre ouvert arboré d’une rangée d’instruments braqués vers les cieux.

J’entends dire que c’est Jupiter, moi je n’en sais rien, mis à part qu’elle est visible depuis quelque temps grâce aux nombreuses applications de cartographie du ciel que j’ai essayé récemment. Contrairement à la Lune j’utilise le pointeur du télescope pour essayer de la capter, et après quelques ajustements, j’approche l’œil de l’oculaire. Je ne suis pas loin d’avoir une image, car j’observe un éclaircissement de celle-ci dans un de ses coins. En me déplaçant légèrement je n’en reviens pas. Je n’avais pas espoir de réussir à la pointer et encore moins de la découvrir en couleur, quasi nette, avec ses Lunes le tout suspendu devant moi (enfin, à quelques centaines de millions de kilomètres). Plus que jamais on peut sentir cette distance vertigineuse, il n’y a rien autour, et depuis notre Terre nous nous déplaçons à toute allure, si bien qu’il me faut en permanence corriger l’image et la recentrer.

Je pense alors à la remarque faite plus tôt par l’un des organisateurs en voyant mon matériel, et, qui après m’avoir conseillé, me disait clairement que « j’étais foutu ». Effectivement il suffit de mettre un pied dans cet univers pour rapidement voir se tisser un lien fort avec cette nature incroyable et le spectacle qu’elle nous offre. Je suppose que l’on souhaite toujours en voir plus et voir toujours plus loin, plus tôt, impliquant un matériel plus important et des conditions d’observation encore plus délicates.

Après un dernier détour par la Lune, et ses cratères toujours plus beaux au fil de son évolution dans le ciel, je décidai d’essayer de mettre en station ma monture, mais ce fut un échec, pas suffisamment préparé, trop de lumière éblouissante pour essayer de repérer Polaris, pas les bonnes coordonnés GPS, et puis, les enfants n’attendaient qu’une chose, observer à leur tour.

Transmettre

Voir un ami, en passant, un enfant observer pour la première fois la Lune et ne rien entendre pendant de longues secondes, le souffle coupé par la vue est quelque-chose de fort, c’est un moment de partage que je conseille à tout le monde. Alors c’est peut-être cela que cherche tous les astronomes amateurs, tous ces astrophotographe qui partagent avec nous leurs images réalisées, ici, sur Terre. Il ne s’agit pas d’Hubble, il n’est pas question d’une science inaccessible réservé à quelques-uns. Tous ces astres brillants, ces nébuleuses, ces galaxies, ces planètes sont à la fois parfaitement inaccessibles et pourtant elles sont bien là, à quelques minutes de voiture ou dans l’arrière court d’un astronome fatigué et congelé sur place. Allez le voir il n’y aura pas plus grand plaisir pour lui que de vous ouvrir les portes de ces grands espaces infinis.


Vers l’infini et au-delàs

Je vais à présent me rapprocher de la SAFGA pour discuter et échanger avec eux. Je ne sais pas si d’autres évènements sont programmés ou si simplement de petits groupes organisant des sorties existent dans la région. De mon côté je vais essayer d’organiser des sorties avec famille et amis pour partager cet émerveillement. Je m’essayerai sans doute à l’astrophotographie mais j’ai tant à apprendre avant, que cela viendra en temps voulu. Ce premier contact et cette première expérience a été une franche réussite. Et j’ai hâte d’y retourner.

Quelques liens pour les curieux

Je vous propose quelques liens pour celles et ceux qui souhaitent en savoir plus.



Liens :




La SAFGA (Société Astronomique de France Groupe d’Alsace)



La chaine Youtube de Galactic Hunter



Le DVD du reportage « Ces fous d’Astronomie »